L’école KatsukawaL’art du kabuki et celui de l’estampe trouvent leur point de convergence dans la cité d’Edo, où ils connaissent un essor remarquable au XVIIIᵉ siècle. L’émergence d’une nouvelle classe de marchands et de bourgeois favorise l’essor de cette forme théâtrale novatrice, le kabuki, jugée plus spectaculaire que le nô. Parallèlement, l’estampe se fait l’écho de ce succès dans le contexte foisonnant du quartier du Yoshiwara, véritable foyer d’effervescence sociale et artistique. Les estampes d’acteurs (yakusha-e) traduisent l’enthousiasme populaire pour les représentations à la mode et pour les comédiens en vogue. L’école Katsukawa, fondée dans les années 1760 par Katsukawa Shunshō (1726-1792), accompagne cette évolution en introduisant une individualisation des traits permettant d’identifier les acteurs au-delà des rôles incarnés. Cette démarche constitue une rupture avec les représentations antérieures, davantage centrées sur la figuration de scènes emblématiques issues de pièces célèbres. Shunshō privilégie l’étude du visage et des caractéristiques propres à chaque interprète, s’inscrivant dans une quête de ressemblance (nigao-e) qui vise à restituer la personnalité réelle de l’acteur. Ses élèves, notamment Katsukawa Shunkō (1743-1812) et Katsukawa Shun’ei (1762-1819), prolongent cette orientation : ils recourent à des cadrages plus serrés, suppriment fréquemment les arrière-plans et mettent l’accent sur l’expressivité, la précision du trait et la capture de l’instant suspendu. Ces productions annoncent l’apogée du portrait d’acteur en gros plan (okubi-e), sur fond neutre, tel qu’il sera magnifiquement développé par le mystérieux Sharaku. Aujourd’hui, ces œuvres sont appréciées à la fois pour leur valeur documentaire, en tant que témoignages d’une époque et de ses grandes figures théâtrales, et pour leurs qualités plastiques. Si l’identification précise des rôles et des acteurs demeure parfois difficile pour un regard occidental non spécialisé, celui-ci peut néanmoins saisir l’intensité dramatique et la force expressive qui s’imposent dans un format réduit, où l’épure formelle magnifie l’essence du trait. |  |